31 mai 2002

La Cathédrale de Séoul

La Cathédrale de Séoul est un haut-lieu de la chrétienté coréenne. Elle n'est pas la première église du pays, ni l'endroit où coula le sang des martyrs, mais elle fut bâtie sur le lieu même où habitait Kim Pom-Ou, Thomas, premier martyr coréen.


La Cathédrale de Séoul est un haut-lieu de la chrétienté coréenne. Elle n'est pas la première église du pays, ni l'endroit où coula le sang des martyrs, mais elle fut bâtie sur le lieu même où habitait Kim Pom-Ou, Thomas, premier martyr coréen.

Elle abrite, dans sa crypte, les reliques de 9 Confesseurs de la Foi, à savoir 5 martyrs canonisés en 1984 : St. Laurent Imbert MEP, St. Pierre Maubant MEP, St. Jacques Chastan MEP, St. Antoine Kim, St. François Choi (père du deuxième prêtre coréen: Choi Yang-Op), ainsi que 4 autres martyrs non-canonisés: les Pères Jean Antoine Pourthié et Michel Petitnicolas MEP et 2 martyrs coréens inconnus.

Un peu d'histoire:

1784 est regardée comme la date de la fondation de l'Eglise de Corée. Deux laïcs jouèrent dans cette fondation un rôle de premier plan: Yi Blok et Yi Seung-Hoon Ce dernier faisait partie de l'ambassade qui alla, en 1783, payer un tribut à l'empereur de Chine et recevoir de lui, comme chaque année, le calendrier impérial. Baptisé à Pékin en 1784 par le P. de Grammont, jésuite, Yi Seung-Hoon reçut le prénom de Pierre.

De retour en Corée, il baptisa à son tour Yi Byok (Jean-Baptiste), ainsi que d'autres nobles lettrés qui déjà, depuis plusieurs années, étudiaient des livres catholiques apportés de Chine par les ambassades.

Un jour de 1785, alors que Yi Byok enseignait la religion dans la maison de Kim Pom-Ou, Thomas (le tableau situé dans le transept de la Cathédrale, à droite, représente cette scène), la police fit une perquisition, croyant avoir affaire à une maison de jeux. Les lettrés furent arrêtés, mais bien vite relâchés, car ils étaient des nobles. Par contre, Kim Pom-Ou, Thomas, qui ne l'était pas, fut jeté en prison et torturé, pour le forcer à apostasier. Condamné à l'exil, il trépassa en 1787, des suites de ses tortures: le premier martyr coréen venait de mourir.

Après cela, les chrétiens se dispersèrent et vécurent dans la clandestinité. Ils demandèrent alors à Pékin l'envoi d'un prêtre. En 1795, le premier prêtre, un Chinois, le P. Jacques Chu Mun-Mo (1752-1801) arriva et commença à instruire les chrétiens, mais il mourut martyr de la persécution de 1801.

1831 est la date de la fondation du premier Vicariat Apostolique, confié aux Missions Etrangères de Paris.

L'édifice:

Après les persécutions (1839, 1846, 1866) et la signature du traité d'amitié franco-coréen (1886), les MEP achetèrent le terrain de Myong-dong où se trouvait la maison de Kim Pom-Ou, Thomas, et posèrent les premières fondations de la Cathédrale en 1887, c'est-à-dire 100 ans après la mort du martyr.

Les travaux proprement dits commencent en 1892; Mgr, Mutel est alors Vicaire Apostolique, ayant succédé à Mgr. Blanc, décédé en 1890.

Le P. Eugène Jean Coste (1842-1896) MEP, du diocèse de Montpellier, dessine les plans de l'édifice. Il a déjà à son actif la construction de l'église de Yak-hyon (première église de Corée qu'on peut voir encore aujourd'hui non loin de la gare de Séoul) et de la chapelle du Séminaire de Yong-San.

Le projet de construction de la Cathédrale fut difficile à mener pendant la brève période de 6 ans que durèrent les travaux. Ceux-ci furent interrompus de nombreuses fois à cause du manque de fonds, mais aussi parce que le gouvernement de Choson confisqua le certificat de propriété du terrain et fit arrêter la construction en invoquant des questions de géomancie. De plus, on dut employer des maçons, plâtriers, charpentiers, d'origine chinoise, car il n'y avait qu'un petit nombre de Coréens capables de travailler sur une architecture de style occidental. Tous ces ouvriers furent d'ailleurs rappelés chez eux lors de la guerre sino-japonaise (1894-1895). De plus, il y eut aussi de nombreux accidents à déplorer, en particulier la mort de 4 travailleurs lors des travaux de terrassement; le clocher s'écroula plusieurs fois; on dut réduire sa hauteur.

On fit appel également aux conseils techniques de la délégation russe et à l'architecte

russe Scredin Sabatin qui dessina les plans de l'Arche de l'Indépendance en 1898.

Le P. Coste meurt en 1896, à l'âge de 54 ans, avant l'achèvement de la Cathédrale. C'est le P. Victor Poisnel MEP, du diocèse de Coutances, qui mène à bonne fin la construction. L'édifice, dédié à 1"'Immaculée Conception", est consacré le 29 mai 1898, jour de la Pentecôte. A cette cérémonie assistèrent les descendants des ministres d'Etat coréens qui avaient persécuté l'Eglise pendant 100 ans. Parmi eux, il y avait le petit-fils du Régent Tae-Won-Gun qui était au pouvoir pendant la grande persécution de 1866.

L'édifice est en style gothique, en briques grises et rouges. Quant à ses dimensions: longueur 68 m, largeur 29 m, hauteur 23 m. Le clocher est haut de 46 m, le maître-autel a été offert par la baronne de Gargan.

On a fêté le centenaire de la Cathédrale le 29 mai 1998. Le P. Jean-Baptiste Etcharren, alors Vicaire Général, et le le P. Etienne Perrin, assistant, y représentaient la Société des Missions Etrangères de Paris, ainsi que Mgr. René Dupont, Supérieur Régional de Corée.

A noter, enfin, que la Cathédrale de Séoul a servi, dans les dernières décennies, de forteresse dans le processus de démocratisation de la Corée.

Elle est, non seulement le symbole de l'Eglise, mais aussi de la liberté et des droits de l’homme. Même aujourd'hui, (25 octobre 2002) toutes les couches de la société y viennent faire part de leurs revendications.